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Le juriste face au défi du multiculturalisme à l'international

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L'internationalisation des affaires est une source de complexité et d'exposition aux risques. Mais, elle donne au juriste d’entreprise la pleine mesure de sa capacité d'adaptation, d'imagination et de souplesse d'esprit tout en conservant sa rigueur légendaire, à condition de bien intégrer le multiculturalisme.

Par Philippe Blanchet

Il est heureusement loin le temps où le juriste n'abordait les questions internationales qu’au travers de son cours de droit international privé. L'internationalisation du monde des affaires, la mondialisation, l'incursion de la common law dans le droit positif continental ont obligé le juriste à s'ouvrir à l'international. La langue de Shakespeare et de Cervantes ne sont plus considérées aujourd’hui comme des secondes langues mais comme des langues de travail au quotidien. Et le chinois est désormais maîtrisé par les plus jeunes ! Avant même de maîtriser d’autres systèmes juridiques, il s’agit de bien s'imprégner de la culture de ses interlocuteurs non seulement par respect, mais aussi pour éviter tout impair, afin de faciliter une compréhension mutuelle.

 UNISSONS-NOUS AUTOUR DE LA LEX MERCATORIA INTERNATIONALIS ! 

Un Brésilien, un Américain, un Espagnol, un Sénégalais, un Égyptien ou encore un Chinois possèdent chacun un mode de pensée propre qu'il faut appréhender au cas par cas. Un contrat en langue anglaise, a fortiori soumis au droit américain, n'est pas la simple traduction de son équivalent en français. Son architecture, ses composantes, son vocabulaire sont la résultante de la common law. De même, un contrat en langue française est forgé par l'esprit du Code civil, la concision de ses principes et l'évolution législative et réglementaire. Prenons l’exemple d'un organigramme d'une société chinoise présenté au cours d’une réunion (down/top et non l'inverse comme dans notre univers familier) : quel choc pour un occidental, il semble à l’envers ! C’est oublier que nos planisphères, autocentrés sur l’Europe, sont aussi exacts que ceux mettant au centre le détroit de Béring, la Chine ou l’Australie en partie haute. Question de point de vue ! De même, dans la civilisation chinoise, la prédominance du tampon encreur sur la signature manuscrite est un lointain souvenir des Sceaux de l’Héritage du Royaume en jade des empereurs de l'Empire du milieu. Ne parlons même pas du système judiciaire nippon, d’actualité récente, dont le fondement suprême est la présomption de culpabilité. Les palabres en Afrique, le consensus en Asie ou encore l’âpreté des négociations au Moyen-Orient ne sont pas que des lieux communs, ils ne sont que le reflet des cultures locales qu'un juriste ne saurait ignorer dans sa pratique. Il est évidemment illusoire de vouloir connaître en détail chaque droit, heureusement les conseils externes locaux sont là pour cela, mais il serait préjudiciable de ne pas être sensibilisé à la culture locale avant d'aborder une négociation. Combien ai-je vu de retards ou d'échecs inutiles dus à de simples maladresses et incompréhensions qu’il eut été si aisé d’éviter. Au cœur de l’entreprise, le juriste d’entreprise saura ainsi transposer pour sa direction générale et ses opérationnels les multiples univers dans lesquels il évolue pour en simplifier la compréhension et faciliter la prise de décision.


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